La carte cognitive, selon
les psychologues cognitivistes est une représentation mentale d’un
environnement physique que l’organisme construit lors d’un apprentissage
complexe. Cette carte concerne aussi bien le processus d’apprentissage des
individus que l’adoption des plans stratégiques ou des découpages des territoires.
Pourquoi les Etats-Unis par exemple, à un certain moment de leur histoire, et
après moult réflexions et luttes, ils ont conçu leur pays sous forme de 50
Etats : effet de l’histoire ou effet de la carte cognitive de
l’époque ? Pourquoi à un certain moment
de l’histoire, il eût la guerre froide qui divisât le monde en deux ?
Pourquoi à un certain moment de l’histoire, il y eut l’apparition du bloc des
pays non alignés ? Pourquoi à un moment de l’histoire les Etats Européens
ont décidé de préparer leur union ? Et pourquoi encore les Etats-Unis
pensent actuellement à reconstruire le Grand Moyen Orient ? Autant de
questions auxquelles on devrait trouver réponse dans les structures mentales de
la cartographie cognitive.
En 1908 la cartographie
cérébrale de brodmann est définitivement adoptée, elle dévoile 52 zones
cérébrales ; coïncidence ou pur hasard le nombre des zones corticales est
presque le même que celui du nombre des Etats d’Amérique. L’Amérique en optant
pour ce découpage aussi bien du cerveau
que de la géographie obéit sûrement à une force latente qui lui fait admettre
la réalité sous le même nombre. Que de réalités scientifique ou politique
adoptées uniquement sous la puissance occulte du chiffre. Le cerveau est lui
aussi une géographie, mais qui impose à la vraie géographie sa propre
puissance. La puissance des neurones.
Après les années
soixante-dix du vingtième siècle, une nouvelle cartographie commence à prendre
consistance, elle tourne autour de l'idée forte de la présence de colonnes
cérébrales au sein du cerveau humain. La présence de ces colonnes se dévoile
par la présence de deux types de cellule: les cellules étoilées et les cellules
pyramidales."les cellules "pyramidales", nous apprend
Jean-Pierre Changeux, se reconnaissent par leur corps cellulaire conique, leur
dendrite apicale qui part verticalement vers la surface du cortex, et leurs
dendrites basilaires en forme de racines; leur axone s'enfonce en profondeur et
sort finalement, du cortex. Les cellules étoilées restent à l'intérieure du
cortex. Elles portent des noms suggestifs de la diversité de forme de leurs
arborisations"[i]. Grâce à la longueur, la
taille et la ramification des cellules pyramidales, l'idée de l'existence de
colonnes ramifiées de communication
cérébrale prend forme et consistance, et comme l'explique Jean-Pierre
Changeux hors du cortex…
Les cellules étoilées qui
ne quittent pas l'enceinte du cortex sont diverses. Changeux décrit l'une
d'entre elles comme suit:"à double bouquet dendritique dont le cylindre
axe(ou axone) s'épanouit en une arborisation extrêmement touffue"[ii].Il décrit une autre
cellule étoilées comme suit: "à cylindraxe court et ramifié en longues
branches horizontales"[iii]
L'adoption de l'idée de la
présence de colonnes et d'étoiles de communication au sein de la boite cranienne s'est conçue
comme un grand dépassement de la théorie de spécification et de localisation
des zones corticales. Cette nouvelle conception neurologique a eu beaucoup de
retombées sur les domaines économiques et politiques. A vrai dire, il est très
difficile de dire qui de ces domaines a transféré à l'autre son modèle de
pensée. La théorie de la spécification des zones corticales, cette théorie
purement atomiste, correspond parfaitement à des modèles de conception
politique et économique. Ainsi par exemple, l'idée de l'Etat Nation, durant
la période qui s'étale de la première guerre mondiale jusqu'aux années
soixante du vingtième siècle doit son exploit à l'atomisation du système de
communication cérébrale. Les Etats ne sont conçus que comme des petites entités
qui ont besoin pour survivre à l'arme de
la bombe atomique. Ainsi l'atomisation des systèmes a sans doute valorisé à
l'extrême le système de l'atome.
Durant un siècle on a vu
succédé quatre types d'Etat qui ne sont entre autre que la prolongation
épistémique de l'exploration des cellules cérébrales. On est passé de l'Etat
Nation à l'Etat raciale, en passant par l'Etat continental à l'Etat mondial
L'atomisation cérébrale
est succédée par l'acceptation de l'idée de fonctionnement par intérim: une
zone corticale en hibernation, par exemple celle de la vision pour les
non-voyants, transfère son pouvoir de fonctionnement à une autre zone
corticale, celle du toucher ou de la parole. Le fonctionnement par intérim, qui
n'a pas en réalité succédé à la théorie de spécification corticale, mais qui a
cohabité avec elle, transfère lui aussi son pouvoir de concevoir a l'économique
et au politique. La conception de la réalisation de l'idée du protectorat au
Maroc, ou l'idée de donner conseil par le FMI par exemple a un pays pour adopter les même mesures économiques et
politiques appliquées par un autre pays pour s'assurer les privilèges du
progrès, est en quelque sorte un type de fonctionnement par intérim adoptée
grâce à la nouvelle carte cognitive.
Actuellement l'idée des
colonnes cérébrales est une idée qui structure à merveille l'espace géopolitique du globe terrestre. On
assiste sur le plan économique à l'ébranlement du capital nation, à la
disparition graduelle de l'Etat nation et à
l'apparition des grands espaces économiques et des grandes nations
continentales comme celle de l'union européenne, ou celle des regroupements
financiers, ou celle encore des zones commerciales du libre échange. Ainsi, il
faut admettre que le monde se conçoit comme une pure et simple carte cognitive
ce qui veut dire qu'il faudrait faire
valoir le mental au détriment du réel. Si les locataires de la maison blanche
se battent pour imposer une nouvelle carte du moyen orient c'est qu'ils sont
sous le joug d’une nouvelle carte
cognitive dont les soubassements et les présupposés laissent croire à l’unique
éventualité de ne pas négocier le futur monde.
Que de comportements
étranges, en une seule journée toute l'Espagne s'est vue basculer vers la
gauche, et, par là, contre ce qui s'était conçu à une date récente comme allant
de soi: la guerre "légitime "en Iraq…
Les politiques
obéissent-elles uniquement aux principes des intérêts, ou sont-elles aussi le
fruit de cartes cognitives?
Au sein de notre dépôt
intellectuel, entre les interstices de la géographie des neurones, s'installe
une immanence qui à chaque fois devant une situation à résoudre elle prête à
cette autre géographie une façon d'interpréter et de comprendre. A la façon des
plantes, cette immanence est sans doute une sève qui irrigue et jalonne tous
les parcours et les entrailles ?
Les colonnes cérébrales
qui s'assemblent et s'étendent depuis le tronc jusqu'aux extrémités des limbes,
et à travers tous les sillons et toutes les circonvolutions, les protéines qui
les font nourrir que véhiculent-elles?
Si non des idées et des modules. Le module religieux par exemple, lui aussi
n'échappe pas à cette règle.
Etrange, le chiffre quatre
traverse le module religieux. Effet du hasard ou effet de la géographie des
neurones. Les trois religions monothéistes, chacune d’elle fait reposer son
socle sur quatre dogmes référentiels bien distingués. Le christianisme reconnaît quatre évangiles.
L’islam admet quatre dogmes :
·
Le dogme malékite
· Le dogme hanafi
· Le dogme wahhabi
· Le dogme chiite
Ce dernier dogme, lui
aussi par coïncidence de l’histoire, s’est subdivisé en quatre sous dogmes
interprétants.
Les savoirs scientifiques
laissent des traces, les leurs d’abord, celles de leur propre histoire et de
leur propre évolution dans le temps ; mais elles laissent aussi des traces
d’autres choses que nous ignorons tous et qui façonnent nos méthodes et nos
interprétations. Les connaissances scientifiques sont des connaissances par ce
qu’on y croit aussi et du moment qu’on y croit plus elles ne sont plus des
connaissances scientifiques. Que sont –elles alors ? De pures spéculations
idéologiques ! Ou de simples avatars de simples principes scientifiques
presque immuables.
Pour construire un savoir
on a toujours besoin d’un schéma. Ce schéma on ne le construit pas on l’hérite
de notre passé et on lui donne forme selon cette géographie cartographique que
nous nommons culture et religion. Les
sérails du savoir ressemblent aussi à ceux de la croyance et de la culture. Ils
sont presque toujours le fruit d’un texte religieux Même les chiffres sont dotés d’une
religiosité. Parfois c’est le chiffre trois chrétiens qui leur donne forme et
dans d’autres cas c’est le chiffre "sept" musulman. Incroyable les
frontières entre la religion de la science et la science de la religion se
mêlent. Sciences de l’esprit et esprit de sciences se côtoient et se miroitent
sans cesse. Y’a-t-il vraiment une science qui ne soit mêlée à une croyance. Ce
sont aussi les croyances qui décident de l’avenir de la science
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